« Coupe-faim de la mort » : des collusions avec les autorités sanitaires ?
Jusqu’à quel point les intérêts financiers prévalent-ils sur les préoccupations de santé publique ? C’est la question que pose l’affaire du Mediator, ce médicament pour diabétique en surpoids, produit par les laboratoires Servier, qui aurait causé entre 500 et 1000 morts selon l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Commercialisé en France depuis 1976 jusqu’à son interdiction en 2009, il aurait en outre provoqué de graves problèmes cardiaques chez près de 3500 personnes, qui ont dû être hospitalisées. Xavier Bertrand, le nouveau ministre de la santé, a appelé ce mardi « tous ceux qui ont pris du Mediator » à consulter un médecin. L’avocat de plusieurs victimes évoque un « scandale sanitaire », tandis que des spécialistes du dossier dénoncent une interdiction trop tardive du médicament.
Pour parvenir à ces chiffres, la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) a évalué sur demande de l’Afssaps l’augmentation des risques de valvulopathie (maladie des valves cardiques) imputable au Mediator, en se fondant sur la consommation du médicament en ville, les données d’hospitalisation et celles de décès. Une première étude, datée de novembre 2009 et portant sur plus de 43 000 diabétiques ayant pris du Mediator, faisait déjà apparaître que ces derniers avaient trois fois plus de risques de souffrir de cardiopathies vasculaires et quatre fois plus de risques d’avoir besoin d’une chirurgie valvulaire que ceux suivant un autre traitement.
D’après le laboratoire Servier, qui doit faire face à quatre plaintes de patient depuis le retrait du médicament, ces chiffres ne seraient en revanche que des « hypothèses fondées sur des extrapolations ». « Si on rapporte le nombre de 500 décès au nombre de patients qui ont pris le Mediator sur trente-trois ans, on arrive à un risque de 0,005 % » poursuit le représentant de la société, précisant toutefois que « en termes d’image de marque, c’est déplaisant ».
Des déclarations qui peinent à dissimuler un scandale de santé public doublé de soupçons de collusion entre le groupe français et les autorités sanitaires. En effet, les effets nocifs du dexfenluramine (que contient le médicament) sur les valves cardiaques avaient été soulignés dès 2007. Le Mediator avait alors été progressivement interdit aux Etats-Unis et en Europe, mais pas en France où il restait en 2007 le 44ème médicament le plus vendu.
Dans un livre publié en 2006 (Mediator 150mg), le docteur Irène Frachon mettait en évidence le lien entre consommation de Mediator et valvulopathies, et s’employait à dénoncer l’inertie des autorités sanitaires ainsi que la manière dont le laboratoire Servier avait réussi à repousser l’interdiction.
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