Prostitution : vers la pénalisation des clients ?
C’est ce mardi que les députés vont relancer le débat sur la prostitution : entre les partisans de son abolition et les défenseurs d’un encadrement, le débat risque d’être houleux à l’Assemblée Nationale, qui examine aujourd’hui une résolution visant l’abolition à terme de la prostitution. Une loi qui pourrait concerner les 20 000 personnes qui se prostituent en France selon des estimations.
Cette résolution, qui « réaffirme la position abolitionniste de la France en matière de prostitution » vise à « battre en brèche les idées reçues qui laissent croire que sous-prétexte que laprostitution serait le plus vieux métier du monde, elle est une fatalité », expliquent ses auteurs. Le texte est présenté par la député PS Danielle Bousquet, qui a présidé une mission d’information parlementaire sur la prostitution en France, le député UMP Guy Geoffroy, rapporteur de la mission, et tous les présidents de groupes à l’Assemblée. « Il fallait une étape importante, symbolique et solennelle » dans la lutte contre la prostitution, explique Guy Geoffroy. Le texte précise que les principes abolitionnistes, adoptés par la France en 1960, « doivent être proclamés haut et fort à une époque où la prostitution semble se banaliser en Europe ».
Outre le vote de cette résolution, les députés vont se pencher sur une proposition de loi qui vise à pénaliser les clients. Guy Geoffroy parle de « responsabilisation » pour rappeler « que neuf personnes prostituées sur dix sont victimes de la traite des êtres humains ». Actuellement, recourir à une personne prostituée n’est pas un délit. Mais la mission parlementaire, s’inspirant de la Suède qui sanctionne les clients depuis 1999, a conclu au printemps que la pénalisation du client constituait « la meilleure piste pour voir diminuer la prostitution en France, là où tous les pays qui ont réglementé cette activité l’ont vu augmenter ».
Cependant, le sujet fait débat, entre ceux qui prônent la disparition totale de la prostitution, et ceux qui défendent un meilleur encadrement. Quarante associations ont d’ailleurs lancé un appel pour abolir la prostitution. Parmi elles, la Fondation Scelles. « Sur ce sujet, le consensus n’est pas fait », a reconnu son président, Yves Charpenel, à l’AFP. « On voit régulièrement ressurgir des propositions de réouverture de maisons closes », a quant à elle regretté Hélène de Rugy, déléguée générale de l’Amicale du Nid.
D’autres associations se sont elles prononcées contre cette abolition, comme, le Syndicat des travailleurs du sexe (Strass) qui a demandé aux députés de ne pas voter la résolution, estimant que cela pénalisera les prostituées en les poussant vers plus de clandestinité. Act-Up et Aides, réunis avec le Strass et 14 associations au sein du Collectif « Droits et prostitution » partagent ce constat, affirmant que face à la réduction du nombre de leurs clients, les prostituées seraient contraintes d’accepter des rapports non protégés. Cette résolution pourrait conduire a davantage de précarisation, et pousser l’exercice du métier dans la clandestinité. Plus que la prohibition, c’est un encadrement que l’Etat devrait assurer, car il faut distinguer la prostitution subie des réseaux mafieux, à celle choisie par des femmes qui utilisent leur corps pour vivre.
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