Egypte : un projet de Constitution ambigu aux forts accents de Charia
Sur les 236 articles du projet de Constitution égyptienne, beaucoup sont critiqués par l’opposition qui s’élève contre ce qu’elle considère être une forte intrusion des islamistes dans les affaires de l’Etat.
Après les différentes manifestations menées contre le président Mohamed Morsi qui projette d’accroître ses pouvoirs, les Egyptiens sont appelés à voter pour ou contre le projet de Constitution lors d’un référendum samedi 15 décembre. Le texte été rédigé dans un climat très tendu qui a poussé des dizaines de membres de l’Assemblée constituante à quitter les sessions de travail, ne supportant plus l’ingérence religieuse dans le processus d’élaboration du nouveau texte. Les Frères Musulmans et les salafistes ont largement contribué à l’édification du projet, ce que de nombreux Egyptiens voient comme une porte ouverte aux lois des islamistes radicaux.
La Charia déjà très présente dans la constitution de 1971 et retirée après la chute de Moubarak, se retrouve renforcée dans les articles que proposent les islamistes. Outre l’intégration explicite de la Charia, on retrouve les règles et la jurisprudence religieuses et l’université Al-Azhar est transformée en un établissement qui doit « prêcher l’Islam en Egypte et dans le monde entier ». En ce qui concerne la punition des crimes, le code pénal n’est tout bonnement pas évoqué, ce qui peut laisser penser que la loi islamique comblera cette lacune pour certains crimes.
Seules les religions monothéistes comme l’islam, le christianisme et le judaïsme, bénéficient de la liberté de culte. Toutes les autres croyances ne sont pas évoquées, signe que des persécutions pourraient avoir lieu contre ceux qui pratiquent d’autres religions.
Le texte permet à la police de préserver « la morale publique », notion vague laissée à la libre interprétation des agents. La liberté d’expression semble elle aussi remise en cause, puisque les islamistes veulent interdire les critiques du prophète et des autres figures religieuses, selon une interprétation rigoriste de l’islam.
Les pouvoirs du président sont renforcés et grâce à eux, il peut commander un déroulement secret des sessions parlementaires, ce qui bafoue le principe de séparation des pouvoirs exécutifs et législatifs. En parallèle, l’armée devient plus indépendante, puisqu’un officier doit être choisi pour être le commandant en chef des force armées qui tient aussi la place de ministre de la Défense.
Tous ces éléments éloignent un peu plus l’idéal de démocratie auquel les Egyptiens aspiraient tant en renversant l’ancien régime de Moubarak. Il leur reste cependant la voie du vote pour rejeter une Constitution qui risque de faire régresser davantage leurs droits civiques.
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