Présidentielles : des intellectuels appellent à une primaire à gauche
La fracture entre le gouvernement de François Hollande et le reste de la gauche se fait de plus en plus sentir.
Les tensions au sein de la gauche révélées par la déchéance de nationalité
Ces tensions se cristallisent dans la réforme constitutionnelle prévue par le gouvernement, et plus particulièrement dans la question de la déchéance de la nationalité des binationaux coupables de « mise en danger de la vie de la nation ». De nombreux députés et sénateurs socialistes refusent de soutenir le gouvernement et se préparent à voter contre cette mesure. Même d’anciens ministres se sont exprimés avec virulence à ce propos : Benoît Hammon, par exemple, estime qu’il s’agit « d’une question de valeurs et de conscience » et que cette décision va marquer une rupture au sein de la gauche, si ce n’est de la communauté nationale. Quand à Jean-Luc Mélenchon, fondateur du Parti de Gauche, il se dit saisi par « la nausée absolue ».
En effet, la déchéance de nationalité est une mesure demandée par la droite depuis longtemps. Nicolas Sarkozy l’avait évoquée durant son mandat avant d’abandonner cette idée. Quant au Front National, malgré son petit nombre de députés, ils s’apprêtent tous à voter pour le texte et Marion Maréchal Le Pen a même évoqué une « inflexion positive » de la politique de François Hollande à ce sujet. En maintenant cette réforme envers et contre tout, le gouvernement prend donc le risque de perdre le soutien de la gauche du Parti socialiste, sans parler d’autres partis comme Europe Ecologie Les Verts ou le Front de Gauche.
Une fracture plus ancienne
Néanmoins, l’agacement du reste de la gauche française face à la politique du gouvernement n’est pas nouvelle. Cela s’est traduit notamment par le refus du parti écologiste de participer au gouvernement de Valls. Dans la base militante des partis, on lui reproche également l’abandon de nombreuses mesures, notamment celle sur le droit de vote des étrangers qui était une promesse phare de la campagne d’Hollande en 2012. Le Mouvement des Jeunes Socialistes, pourtant l’organe du Parti Socialiste tourné vers les jeunes, sont également très déçus de la loi sur le renseignement prise suite aux attentats de janvier 2015, qu’ils considèrent comme une entrave à la mobilisation citoyenne.
Une primaire à gauche ?
Face à toutes ces tensions, une question se pose : François Hollande, s’il se représente, doit-il être le candidat reconnu du Parti Socialiste pour les présidentielles de 2017 ? D’habitude, un président qui se propose pour sa réélection est soutenu par son parti. Ce fut le cas de Mitterrand en 81 et de Sarkozy en 2012. Mais en l’occurrence, le Président de la République, pour beaucoup, ne représente pas les valeurs que la gauche souhaiterait mettre en avant au vu de son bilan. De plus, les sondages le qualifient de président le plus impopulaire de l’histoire de la Ve république, derrière Sarkozy. Il s’agirait donc d’un pari risqué.
D’un autre côté, devant les scores de plus en plus importants du Front National d’élection en élection, présenter un second candidat à gauche en plus de François Hollande n’est pas sans risque : diviser les voix des électeurs entre deux candidats pourrait favoriser la droite, et le Front national en particulier.
Devant cette situation délicate, de nombreux militants et intellectuels ont lancé un appel : celui d’une élection primaire à gauche, sur le modèle de celle qui a été faite au Parti Socialiste en 2012. Le principe serait de faire voter les militants et sympathisants pour choisir un candidat unique à gauche qui se présentait pour la présidence. Cela permettrait de ne prendre ni le risque de voir Hollande se représenter seul, ni celui de diviser les voix de gauche. Cet appel prend la forme d’une pétition, par laquelle ils espèrent influencer François Hollande.
« Nous n’acceptons pas que la menace du FN, le risque terroriste et l’état d’urgence permanent servent de prétexte pour refuser de débattre des défis extraordinaires auxquels notre société est confrontée. » écrivent-ils sur notreprimaire.fr, le site de la pétition, « Il n’y a pas de fatalité à l’impuissance politique. »
Parmi les initiateurs du projet, on retrouve l’eurodéputé Daniel Cohn-Bendit, l’économiste à succès thomas Piketty, l’historien Pierre Rosanvallon ou encore l’écrivain Marie Desplechin.
Reste à savoir si François Hollande se soumettra à cette élection primaire. Pour l’heure, il n’a fait aucune déclaration et n’a pas non plus donné d’informations sur la possibilité d’une candidature en 2017.
« InfirmierIstanbul : explosion dans un quartier touristique »