Buzz : beaucoup de ramdam pour rien ?

Le concours « Francomot » a atteint son but : remplacer les mots chat, talk, tuning, buzz, et newsletter par des mots à cent pour cent français. Une affaire qui fait grand bruit, autant pour l’utilité discutable de ce genre d’opération que pour le mot « ramdam », remplaçant désormais le mot « buzz », qui est d’origine… arabe.

Le 15 janvier dernier, Alain Joyandet, secrétaire d’État chargé de la Coopération et de la Francophonie, a lancé un concours destiné aux étudiants en dernière année de Master ou aux élèves des grandes écoles. Appelé « Francomot« , ce concours avait pour mission de « trouver des substituts aux trop fréquents anglicismes – utilisés souvent pour définir des outils liés aux nouvelles technologies. » But du jeu : envoyer par mail – pardon, par courriel – des mots franco-français pour remplacer « chat », « talk, « tuning », « buzz » et « newsletter ».

Réuni le mardi 30 mars dernier, le jury, présidé par l’académicien Jean-Christophe Rufin et composé entre autres de MC Solaar et de Sapho, a délibéré. Voici donc les grands gagnants :
– chat : éblabla
– talk : débat
– tuning : bolidage
– buzz : ramdam
– newsletter : infolettre

francomot

Au vu du résultat, on peut légitimement se demander quelle mouche a piqué les membres du jury. Si « éblabla » pour « chat » semble trop farfelu pour être sérieux (et puis, comment le conjuguer ? « Hier, j’ai éblablaté avec ma copine sur MSN ? »), « bolidage » ne rend pas compte des différents aspects contenus dans le mot « tuning ». En ce qui concerne le « débat » pour remplacer le « talk », il semble inapproprié puisque « débat » est déjà existant – hors, le « talk » présente des nuances un peu différentes.

Mais celui qui fait beaucoup jaser sur la toile aujourd’hui, c’est bien « ramdam » à la place de « buzz ». Comme dirait Maître Eolas sur Twitter : « Remplacer « buzz » par « ramdam », c’est remplacer un mot anglais par un mot arabe au nom du respect du français. » En effet, ce n’est pas très cohérent : le mot « ramdam » vient du mot arabe « ramadan » qui désigne le neuvième mois du calendrier musulman. Il signifie « tapage » ou « vacarme » et fait référence au tumulte de la vie nocturne lors du jeûne observé par les musulmans pendant le ramadan.

Au-delà de cette maladresse, c’est cette volonté de francisation du vocabulaire qui est remise en question. Est-ce bien utile ? Est-ce toujours justifié ? Si, depuis le boom des nouvelles technologies, le vocabulaire anglais se fait de plus en plus présent dans notre langue, il permet également de l’enrichir et de lui offrir un certain nombre de nuances peu abordables sans apport extérieur.

Se pose, à l’usure, le problème de la compréhension. Quiconque a déjà tenu entre ses mains un document administratif utilisant le vocabulaire officiel se demande encore si le français qu’il parle est bien le même que la langue qu’il a vue écrite. Rien qu’avec ces cinq « nouveaux » mots, des phrases peuvent prendre des tournures ubuesques : « Je e-blablate sur le ramdam provoqué par la dernière infolettre d’un magazine de bolidage », proposée sur Twitter par @MiLKnFruitJuice.

Le site de micro-blogging Twitter aura d’ailleurs bien ironisé aujourd’hui. Voici une sélection des tweets les plus amusants :
– @fastclemmy : Google France va-t-il devoir renommer Google Buzz en Google Ramdam ?
– @Quaillie : Julien Lepers : appuyez sur le ramdam pour donner votre réponse !
– @dddaavviiddd : Ramdam Aldrin est il allé sur la lune ?
– @Charles_Nouyrit : Enchaine les rendez-vous tel Ramdam L’Eclair, aujourd’hui

Si défendre la langue de Molière est un but tout à fait louable, les actions du gouvernement devraient plutôt se concentrer sur l’apprentissage de l’orthographe et de la grammaire dans les écoles françaises, plutôt que de proposer un vocabulaire qui n’entrera jamais dans le langage courant.

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