Nom de code : Flash Mob

Ils surgissent du néant, perpètrent des actes dénués de tout sens, puis se fondent aussitôt dans la masse. Mais qui sont donc ces commandos de l'ombre ?

Chronique d'un phénomène paranormal

Paris, Bruxelles, Florence, San Fransisco et Avignon, 11 septembre 2003 à 14h46. Depuis un mois, circule ce mail sur la toile : « 11 septembre, commettez un attentat poétique. Munissez-vous d'un livre important pour vous, un livre qui a changé votre regard sur le monde. Ecrivez-y une dédicace et libérez-le sur la voie publique, sur un banc, dans le métro, dans un café à la merci d'un lecteur inconnu. Le 11 septembre ne restera pas un anniversaire funèbre, si nous transformons cette date, ensemble, en un acte créateur et généreux. »

New York, Grand Central Station, 31 janvier 2008. Après s'être donnés le mot sur Internet, des centaines de personnes se mobilisent brusquement au même moment, pendant cinq minutes. Le freeze mob est né.
Londres, Liverpool Street Station, 17 janvier 2009. 350 danseurs, recrutés dans la rue, exécutent une chorégraphie (répétée pendant 80 heures) pour une « pub-réalité » T-Mobile. La vidéo sera visionnée plus de 10 millions de fois sur YouTube.
Paris, Place Saint-Michel, 18 février 2009, de 12h00 à 12h05. La consigne du jour : venir avec un livre, lire un passage pendant cinq minutes et se disperser.  

 

Naissance d'un virus interplanétaire

Le premier cas est signalé à New York, début 2003. Nom de code : « Mob Project ». Caractéristiques du phénomène : « une convergence rapide d'individus sans liens préalables, suivi d'une disparition tout aussi rapide »*. Moyens de diffusion : SMS et mails. Autant dire que le journaliste new yorkais, à l'origine de ce mouvement, tenait là la recette parfaite du prochain phénomène de mode interplanétaire : un mélange subtile de douce anarchie, d'interaction joyeuse, la touche artistique et ce côté pouvoir-au-peuple qui fait la joie des networkers. Et le buzz est là. En un été, le virus se propage à l'Asie, l'Europe, l'Amérique Latine et l'Australie, plongeant les analystes dans la confusion la plus totale sur la nature dudit phénomène. « S'agit-il d'une nouvelle forme d'art, de convivialité urbaine, de contestation ou d'une réappropriation de l'espace public? »*

 

Un virus en mutation ?

Au commencement, le mouvement n'est que pur art, avec un esprit bon enfant à base de bataille de polochons et de largage de canards en plastique jaune, dans la fontaine de la Place des Arts (Montréal, 9 août 2003). Mais depuis peu, le phénomène mute. Il est récupéré par les publicitaires, qui y décèlent la manne au trésor du gigantesque marché des internautes (voir la vidéo T-Mobile, sur notre site). Mais il est surtout repris pour intégrer le répertoire monotone des actions collectives de contestation : les grèves générales, grèves d'occupation, manifestations et autres défilés. La preuve en est avec le mouvement de contestation des universités. Depuis le début du mouvement, les universitaires déclinent toute une panoplie d'actions : cours de traduction du pamphlet « Napoléon le petit » (Victor Hugo) dans le tramway (Bordeaux, 10 février), lecture-marathon de La Princesse de Clèves (Panthéon, 16 février), lecture-éclair (Place St-Michel, 18 février) et « non enterrement de l'enseignement supérieur et de la recherche » (Panthéon, 26 février). Les universitaires rivalisent d'ingéniosité pour exprimer leur inquiétude. Et ça marche. Simple, rapide et efficace, le buzz est toujours au rendez-vous et permet aux universitaires, largement ignorés par les grands médias, de se faire entendre. Alors, mutation ou maturation ? Le phénomène semblerait avoir atteint l'âge de la maturité et trouvé sa vocation : reprendre le flambeau du mouvement non-violent de contestation, laissé vacant par Gandhi et Mandela. Avec la touche fun en plus.

 

Vous aussi, vous pouvez devenir un flash mobber. Pour cela, il vous suffit de taper ce code sur la toile : Flash Mob.

 

* Source Wikipédia


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