L’immaculée exposition

Le Centre Pompidou met une dizaine de ses salles à nu pour la rétrospective Vides, rétrospective d'expositions ne  » montrant rigoureusement rien « , orchestrées par les grands noms de l'art conceptuel. Circulons, il n'y a rien à voir ?

Perché au-dessus des flots mouvants des foules incessantes des Halles, entre quatre cimaises vierges, l'état flottant du vide. Le regard vient cogner avec une violence assourdie sur les murs nus et, affolé, ne sait où s'accrocher. Des spectateurs étourdis et timorés déambulent timidement comme des pingouins gauches qui prendraient tout à coup conscience de l'immensité virginale et infinie de la banquise. Vide alors, l'exposition au Centre Pompidou ? Que nenni ! Chaque vide est différent. Il y a le vide primordial, celui d'Yves Klein, le vide radical du 28 avril 1958, qui tente une réflexion sur le monochrome. Il y a aussi le vide politique et militant de Maria Eichhorn qui, plutôt que d'exposer ses œuvres, consacre son budget à la rénovation de la Kunsthalle de Berne, laissant le musée vide. Il y a les vides qui ne le sont pas, qui sont des leurres, cachant le système d'écoute de Roman Ondak ou qui sont exposition de l'air conditionné.
Non seulement ces salles ne sont pas vides conceptuellement parlant, mais elles sont physiquement traversées et envahies par une pléthore de visages et de regards ahuris, déconcertés ou…vides, de réflexions avisées du type  » Faites gaffe, il y a quelqu'un en train de voler un tableau  » ou même  » Il faut de l'inspiration ! « . Peut-être faut-il, comme l'eut désiré Robert Barry, prendre le temps, hors de toute agitation, de toute image polluante, de réfléchir et d'échanger. C'est sans compter sur nos contemporains que le vide rend de toute évidence nerveux et/ou angoissés et exhorte à rire pour exorciser la peur d'être face à eux-mêmes. Notre génération qui sacrifie sa capacité imaginative et qui confond la présence avec la matière…
Et, rêvassant sur les escalators vertigineux du Centre Pompidou, je vis une jeune femme tenant tant bien que mal un cadre vide. Certainement une prise de vues en rapport avec l'exposition puisqu'elle était suivie d'un photographe. Mais rien que cette apparition…Le proverbe anglais ne nous dit-il pas avec justesse et poésie :  » Beauty lies in the eye of the beholder  » (La beauté est dans les yeux de celui qui regarde) ?

Vides, une rétrospective – Jusqu'au 23 mars 2009
Centre Pompidou (niveau 4) – Place Georges Pompidou, 75004 Paris Tous les jours sauf le mardi de 11h à 21h
Billet « Musée et expositions », tarif : 10 euros. Tarif réduit : 8 euros (moins de 25 ans, étudiants en art, théâtre, musique et danse.)


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